ARCHEOLOGIE
Il s'est tenu à Saint-François ce 06 Juin 2014 une conférence présentant le "cimetière colonial" que tout le monde en Guadeloupe appelle "cimetière des esclaves". La conférence, qui s'est tenue à la rotonde des arts, de 18H30 à 21H à été agréablement menée par Mr Jérome ROUQUET archéologue qui a participé aux fouilles.
L'office de tourisme à offert un pot de bienvenue, et le maire Laurent BERNIER, accompagné d'un conseiller municipal était présent. Le public n'était pas vraiment au rendez-vous mais la belle vingtaine de personnes présentes à manifesté sont intérêt par des questions diverses àprès la présentation.
L'archéologie préventive, généralités =>
http://fr.wikipedia.org/wiki/Arch%C3%A9ologie_pr%C3%A9ventive
La convention de Malte (1992) ((texte de loi encadrant l'archeologie)) =>
http://conventions.coe.int/Treaty/fr/Treaties/Html/143.htm
En 2002 est créé l'INRAP (Institut National de Recherches Archéologiques Préventives), 200 agents dans toute la France, dont J. ROUQUET tient à mettre en perspective le processus de déroulement des fouilles archéologiques :
1 - Répertorier les os, établir leur position par un relevé topographique et réaliser des photos en vue zénithale.
2 - En laboratoire, on procède au nettoyage et à l'examen des os.
3(*) - La détermination de l'âge se fait en fonction de l'état de la soudure de trois os du bassin (avant l'adolescence) en un seul à l'âge adulte, puis selon le vieillissement
général des os du corps, paramètre difficile à établir lorsque l'on ne connaît pas les conditions de vie du défunt
4(*) - Le sexe, est lui déterminé suite à l'étude morphologique de l'os coxal (ou os iliaque)
5 - On réalise enfin des analyses pathologiques
Débuté en Janvier 2014, le chantier des fouilles à duré un mois =>
3(*) et 4(*) NOTES DE LE REDACTION :
3(*) : [ L'ÂGE ] La soudure des os coxaux à la puberté donnent une indication de l'âge du défunt _ (ainsi que la croissance des autres os du squelette)
Les trois os en un de l'os coxal
1. Ilion ; 2. Ischion ; 3. Pubis ; 4. Trou obturateur ; 5. Cavité cotyloïde
SOURCE => http://www.medecine-des-arts.com/Os-Iliaque-ou-Os-coxal-Anatomie.html
Le point de soudure de l'os coxal
L'os iliaque aussi appellé os coxal, (en haut à gauche), ici soudé chez l'adulte, est le logement où s'emboite le fémur, os long (en bas) qui cesse de grandir à l'âge adulte. Ici illustrés également l'omoplate (en haut au milieu), os plats, et une vertèbre (en haut à droite) qui est un os court - Photographie originale réalisée par Eric Walravens). L'âge se détermine par l'observation de la soudure de l'os coxal
IMAGE => http://www.afblum.be/bioafb/struos/struos.htm
L'os coxal immature pas en core soudé
Reconstruction 3D (scanner hanche gauche) - enfant de 10 ans, vue latérale, fémur enlevé. P: os pubis, IL: os ilium. IS: os ischion.
SOURCE => http://radiologiquement-votre.com/os-coxal.php
4(*) : [ LE SEXE ] Identifier les différences structurelles entre le bassin de la femme et le bassin l'homme
Parcequ'elle donne naissance, le bassin féminin est plus léger, avec un petit bassin plus large et moins profond que celui de l'homme. La femme a une arcade pubienne plus large et ses cotyles sont plus écartés. Le sacrum est plus large et plus court, le promontoire empiette moins la cavité pelvienne.
Le détroit supérieur est arrondi chez la femme alors qu'il est en forme de cœur chez l'homme.
Enfin chez la femme les épines ischiatiques sont plus écartées et le coccys est plus rectiligne que chez l'homme afin d'augmenter la largeur de la filière génitale.
tiré du livre "Le corps humain: Étude, structure et fonction" Par Christine Brooker pp 414 - 415
Les os du bassin (cliquez pour agrandir)
Le pelvis de l'homme
Le pelvis de la femme
Notez que le diamètre interne du bassin de la femme est plus large
IMAGES TIREES DU LIVRE "LE CORPS HUMAIN : ÉTUDE, STRUCTURE ET FONCTION" DE CHRISTINE BROOKER. Lien si dessus
Le cimetière est connu de la population. En 1992 un crane à été découvert par un promeneur. Le crâne, partiellement abîmé avait la particularité de porter un anneau de servitude, lourd collier métallique typique que portaient les esclaves.
C'est ainsi qu'une prescription à conduit à l'établissement de fouilles préventives.
HADES, une société privée à été mandatée pour l'exploration du site d'une superficie avoisinant les 180 m² (une bande de 3mètres de large sur 6à de long sur la plage selon une orientation d'est en ouest). Les premières estimations font état d'une population qui devait être autour du millier à vivre autour du cimetière, le mobilier inhumé correspond à une période allant du XVII° au XIX° siècle, et on s'attendait à pouvoir trouver une soixantaine de sépultures.
C'est en 2012 que l'INRAP prend la suite des travaux et une équipe de 2archéologues et un topographe vont investiguer sur une aire de 75m². 94 squelette surgiront de terre, dont 89 ont été examinés. On dénombre également 40 réductions de corps et 27 amas osseux. On ignore si tous les défunts étaient des esclaves où si il y avait parmi eux des affranchis et des personnes libres, cependants tout les colons étaient mis en terre autour de la paroisse du bourg.
Sur 94 squelettes entiers exhumés, 89 ont été examinés par les archéologues.
Découvert par l'érosion des côtes (quelques mètres, probablement entre 5 et dix selon une estimation depuis une photo aérienne datant de 1950) le cimetiere s'est révélé lorsqu'un promeneur est tombé sur un crâne avec son lourd anneau de servitude (photographie ci contre)
Les fouilles préventives laisseront place au besoin de préservation du site
LA DATATION DU SITE DE FOUILLES
La datation du site et des vestiges est difficile au Carbone 14 pour une période trop récente, on utilise dans ce cas en archéologie le mobilier qui sert de référence. Malheureusement à Raisins-Clairs, le mobilier s'est dégradé à l'état de résidus. Il n'a été trouvé dans les tombes que des morceaux de céramique, des pièces de boutons de vêtements et des tessons de verre.
Néanmoins, c'est la céramique qui révélera une piste qui permettra de dater le site.
Il s'agit de céramique dite «anglaise». Elle se caractérise par son mode de fabrication où le Cobalt qu'elle contient a l'avantage de rendre ce type de céramique plus blanchâtre, la céramique anglaise a été utilisée entre les années 1780 et 1850
Le cimetière daterait donc d'une période allant de la révolution française à l'abolition de l'esclavage.
LES RITES RELIGIEUX
Le fait le plus visible sur le site est la disposition générale est/ouest des sépultures malgré une disposition d'ensemble très anarchique. Les archéologues s'accordent à dire qu'il est très courant que les chrétiens ont coutume de se faire ensevelir à leur mort dans cette orientation est/ouest.
La surprise à été forte lors de la découverte de deux sépultures orientées nord/sud et deux orientée ouest-est. Il est difficile de dire s'il s'agit de non chrétiens, de personnes tombées en disgrâce ou de choix personnel. Un homme haut de près de 2,30m était inhumé dans une orientation nord sud, c'est le plus grand découvert sur toute cette partie explorée du site, et c'est le seul à ne pas avoir eu de cercueil.
Les sépultures sont toutes individuelles, les cercueils en forme de trapèze sont les plus anciens, enfouis dans les couches inférieures, et ceux en forme d'hexagone datent du XIX° siècle sont plus à la surface.
Un unique cercueil trapézoïdal à été retrouvé par dessus un cercueil hexagonal; Il s'agissait du cercueil d'un enfant.
L'émotion à été particulière lors des fouilles lorsqu'à été découvert un cercueil humble, fait de petites lattes de récupération, tressées entre-elles pour constituer le fond du cercueil.
Autrement, le bois dont sont constitués tous les cercueils vient d'amérique du nord, ce qui s'explique en partie par une normalisation des liens commerciaux après les troubles de l'époque révolutionnaire en France et aux Amériques.
Les yeux affûtés et les techniques de fouilles expertes des archéologues leur on permis de trouver une aiguille dans le sable dcette plage de cette plage. C'est une épingle qui selon eux, aurait servit à un défunt emmailloté
Il a été retrouvé des indices faisant penser que des linceuls étaient utilisés. Notamment dans un cercueil ou on a constaté une déformation des chevilles, comme si les pieds avaient étés serrés dans un linceul.
Aucun vêtement n'a subsisté, on ne sait pas si les personnes décédées portaient des vêtements.
A ce jour il n'a pas été retrouver de crucifix ou de chapelet comme à Sainte-Marguerite, un autre cimetière d'esclaves de la Guadeloupe.
Il ne reste aucun signe de signalisation des tombes, probablement s'agissait-il de croix en bois qui ont dès-lors disparut
LA POPULATION
Il il y a un énorme déficit en personnes ayant atteint plus de la quarantaine. La normale voudrait que environ 75% de la population dépasse les 40 ans, or à Raisins-Clairs ce taux est de 46% uniquement, ce qui témoigne de conditions de vie extrêmement rudes et dures. Il 'agit majoritairement d'hommes, peu de femmes, et, de tous les squelettes, se dégage un très fort taux de pathologies dégénératives, 20% . Il y a énormément de cas d'arthroses.
Ci-dessous, en haut;
- à gauche : Coups répétés sur le tibia, c'est un cas inexpliqué qui est assez fréquent sur le site, ce mal doit être dût à une tâche répétitive et laborieuse
- à droite : Clavicule cassée qui n'a pas été remise en place et s'est retournée sur elle même
Ci-dessus, les images du bas ;
- à gauche : Surproduction d'os après un hématome
- à droite : Machoire fracturée mal resoudée
79% de la population souffrait de pathologies dentaires. Caries, dents usées par l'utilisation de pipes en terre cuite et des cas de mutilations volontaires comme un homme aux dents épointées. Il s'agit d'un homme qui a grandi en Afrique de l'ouest où il est une tradition (encore observable aujourd'hui) qui consiste à se scier les dents afin de les rendre pointues par critère de beauté esthétique.
Il y a quatre cimetières d'esclaves en Guadeloupe
A) Celui de Raisins-Clairs à Saint-François (2012),
B) Sainte-Marguerite à Petit-Canal (1998),
C) l'Anse des Îles à Sainte-Rose (2004?) ,
D) l'Autre-Bord au Moule (2010-2011)
Ils sont situés en bord de mer car, le litorral, faisant partie du domaine royal, est un espace qui n'appartient pas aux colons. Ainsi les esclaves se faisaient enterrer loin de la plantation et des habitations sucrières.
d'autres cimetières de bord de mer semblent anciens et restent à être mieux connus
1) Doyon Capesterre Belle Eau (2005),
2) Baillif (2010, il s'agit là d'un cimetière militaire de colons)
3) Baie-Mahault (2005)
A Saint-François on compte les habitations de Sainte-Marthe et de Courcelles, ainsi qu'une multitude de moulins à vent.
L'AVENIR DU SITE DE RAISINS CLAIRS
Les archéologues, aprés ces fouilles préventives, n'ont pour autant terminé leurs travaux et attirent l'attention sur leurs priorités :
- Nécessité d'effectuer des recherches documentaires, notamment sur l'histoire des plantations
- Procéder à des analyses chimiques, microbiologiques pour déterminer la provenance des habitants enterrés et y voir le taux de personnes nées sur place et des tests médicaux pour identifier les maladies et les causes de mortalité.
- Mettre les résultats en perspective et programmer des recherches dans les cimetières coloniaux de la Guadeloupe
Dans les années 60 Edgard CLERC à été le premier à conserver les antiquités de la Guadeloupe. C'est dans le musée qui porte son nom au Moule que sont déposées les pièces excavées du cimetière des esclaves de Raisins-Clairs sous la responsabilité de l'état, qui avec la Région Guadeloupe et la mairie de Saint-françois ont rendus possibles ces fouilles préventives qui auront duré deux ans depuis 2012.
Le site s'est révélé au grand jour à cause de l'assaut des vagues qui sabordent la plage, l'érodant constamment. La municipalité réfléchit à un moyen de mettre le site en valeur et de le sauvegarder.
MISE A JOUR
Sur la base de nouveaux éléments :
WKTL-Agency Le 17 Novembre 2015, 1h21
Il est à noter que trois vidéos sont disponibles sur l'article original de Guadeloupe Première à l'adresse :
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